The Sex Pistols : Pretty vacant

jeudi 28 mai 2015, par Franco Onweb

Le 14 janvier 1978, vers minuit Johnny Rotten, le chanteur des Sex Pistols pénétrait dans la chambre d’un motel, quelque part dans la vallée de San Francisco. Il était las et fatigué ! Quelques heures plus tôt il était encore sur la scène du Wonderland devant plusieurs milliers d’Américains. Les Sex Pistols venaient de jouer leur plus gros concert

Il s’assit dans un fauteuil, alluma une cigarette et pencha la tête en arrière. Il n’en pouvait plus ! Depuis un an il avait vécu plus de choses que 100 000 personnes en une vie. A quoi pouvait-il penser ? A l’Angleterre, peut être, ce pays ou désormais il était devenu l’ennemi public numéro 1 ? Tous les commissariats du pays avaient sa photo et la presse ne tarissait pas de haine contre lui.

 Il faut dire qu’avec les Pistols ils avaient mis le paquet. Depuis la médiatisation du groupe à la fin de l’été 1976 (soit un an après sa formation) ils avaient un titre interdit par le grand conseil de Londres et la BBC (Anarchy in the Uk), prononcés en direct des obscénités à la télévision, avaient été renvoyés de deux maisons de disques (EMI et A&M), eu la plupart de leurs concerts interdits et surtout ils avaient insultés la reine le jour de son jubilé avec le célébrissime Good Save The Queen. A ce rythme là on peut être fatigué !

D’un geste il alluma la radio : c’était un morceau de Willy Nelson, le vieux chanteur de country. Tout ça pour en arriver là ! A écouter un vieux ringard dans un motel perdu à plus de 50 000 kilomètres de chez lui. Pourtant à la base tout avait bien fonctionné : les Sex Pistols sous l’impulsion de leur manager, le terrible Malcom Mac Laren, s’étaient donné comme mission de réveiller le rock et de déranger la société Anglaise, conservatrice. Il fallait taper dedans : ils y étaient allés !

Quatre types (lui, le guitariste Steve Jones, le batteur Paul Coock et le bassiste Glen Matlock) qui s’étaient coupés les cheveux (un geste hautement politique à l’époque, de toute façon le rock a toujours été une histoire de coupe de cheveux) en jouant des chansons courtes, sur un tempo rapide avec des paroles provocatrices ! Tout le contraire de l’époque ! Les Pistols détestaient à peu prés tout mais surtout ces abrutis de la pensée unique les Genesis et autre Yes ! Résultat des courses il avait été agressé plusieurs fois à coup de couteaux ou de barre de fer par des royalistes ou autre rocky ringards ! Oui tout ça pour ça, pour se retrouver dans un pays lointains (qu’il détestait) pour se retrouver à chanter dans un stade. Oui ils étaient devenus ce qu’il détestait.

 Fleetwood Mac venait de remplacer Willy Nelson à la radio, Johnny alluma une cigarette et soupira ! Il avait compris que tout ça faisait parti du plan de Mac Laren pour vendre sa camelote ! Et oui, c’est lui avait médiatisé tout ce merdier, qui l’avait organisé et financé ! Un journaliste Anglais avait trouvé un nom à tout cela : le Punk Rock ! Et désormais la moitié du rock Anglais sonnait punk ! Et lui Johnny était le dindon de la farce, parce que lui il y avait cru !

Il déboucha une bière et rumina encore de se retrouver dans ce motel pourri ! Uniquement parce que à la fin du concert (un vrai désastre !) il s’était jeté dans un taxi et il lui avait dit de l’emmener dans un endroit tranquille et le type l’avait amené directement au motel de sa sœur !

 Il sursauta. A la radio le présentateur venait d’annoncer avec mépris :

« Voici le nouveau single des célèbres punk Anglais les Sex Pistols : Pretty Vacant ! Le groupe a donné ce soir un concert désastreux au Wonderland, le chanteur s’est même moqué ouvertement du public. » Et là Johnny entend la magnifique intro de guitare de Steve Jones, puis c’est la batterie qui rentre en action et c’est sa voix qui apparait ! Il s’entend et il a honte !

Honte de ce qu’il est devenu, honte de ce qu’est devenu son groupe ! « We are so Pretty, so pretty vacant. » Oui ils sont devenus vides ! D’abord c’est le bassiste Glen Matlock qui s’est tiré le premier au début de l’année 1977. Ce couillon voulait faire de la musique, de la vraie, et il s’était bien gouré d’adresse. Il avait été remplacé par un vieux copain d’enfance de Johnny : Sidney Beverley dit Sid Vicious, en raison de sa manière de se battre : il attaquait toujours dans le dos ! Il savait pas jouer de basse (de toute façon ce n’était pas le problème !), et avait sombré à toute vitesse dans l’héroïne. Il n’était plus qu’un pantin désarticulé qui accumulait les scandales sous le contrôle de Mac Laren. Johnny le supportait plus !

« We are so pretty, so pretty vacant ! » Oui, ils étaient vides de tout sens. Quand sous la pression du groupe, Mac Laren avait du sortir l’album il n’y avait eu que ce pauvre baba de Richard Branson avec sa boite Virgin pour sortir Never mind the bollocks (c’est le nom de l’album !). Un album ou d’ailleurs Sid Vicious n’avait pas joué (il ne pouvait pas et il ne savait pas !), c’est Steve Jones (le guitariste) qui avait fait les basses. Un putain de grand disque qui avait numéro 1 dés sa sortie et pour promouvoir le disque les mecs de Virgin avait mis en avant ce Pretty Vacant, principalement parce que il n’y avait pas de grossièretés dans les textes. Une chanson qui critiquait ouvertement la société Anglaise, trop puritaine, trop conservatrice….

Johnny reprit une bière, se ralluma une cigarette et se tourna vers le téléphone. Il s’entendait encore hurler « We are so pretty, so pretty vacant …and we don’t care !”  Il pensa aux autres, que faisaient-ils ? Facile ! Sid devait chercher de poudre, Steve être avec deux ou trois groupies et Paul devait le suivre avec sa timidité naturelle. Quand à Mac Laren il devait parader devant quelques journalistes et expliquer que demain les Sex Pistols allaient s’embarquer pour le Bresil tournaient un film avec Ronnie Biggs (l’un des types qui avait attaqué le train de Glasgow- Londres), un nouveau scandale en perspective ! Mais non Johnny n’ira pas au Brésil, il veut rentrer chez lui, voir sa mére qui est malade, boire des bières au pub et écouter du Reggae. De toute façon tout cela ne rime à rien ! Il décroche le téléphone et compose le numéro d’un quelconque Holiday In. Il demande la chambre de Mac Laren et c’est John « Boogie » Tiberrie qui décroche (l’assistant de Malcom Mac Laren).

  •  Salut c’est John
  •  Hey mec t’es ou ? Super le concert de ce soir et puis dire à ces gros couillons d’Américains si ils n’ont pas l’impression que l’on se fout de leurs gueules ! Ah, ah super, bon tu arrives ? Ici c’est la fête !
  •  Justement je peux parler à Malcom
  •  Non mec, il tape la discute avec journalistes, tu vois c’est pour le groupe, quoi c’est important !!!
  •  Bon alors dis à ce connard un message de ma part !
  •  Ouais c’est quoi ?
  •  Dis lui que j’arrête, j’en ai marre, je ma casse du groupe et je n’irai pas dans ce putain de Brésil.
  •  Hein quoi, t’es maboul ou quoi ?
  •  Non je me casse, j’arrête !
  •  Hein !!!
  •  Hey mec, n’oublie pas : we are so pretty, so pretty vacant, allez adios amigo
  •  Johnny, déconne pas !
  •  Bye

Johnny raccrocha, il se sentait mieux ! Il reprit une bière et dit appela par téléphone la réception :

  •  Si quelqu’un appelle Johnny Rotten dite qu’il n’est pas là et que désormais il n’y a que Johnny Lydon (son vrai nom). Ok merci !

 

 Il se rassit et pour fêter ça il reprit une bière !