Les Fils de Joie : pour la sortie du double album Live, une histoire du groupe en photos

mardi 25 mars 2025, par Franco Onweb

Les Fils de Joie viennent de sortir un double album Live ! Pour fêter la sortie de ce double opus remarquable, j’ai proposé au chanteur et guitariste du groupe, Olivier de Joie, de me raconter l’histoire des Fils de Joie en photo. Suite à son enthousiasme, je lui ai envoyé une dizaine de photos qui représentaient les différentes étapes du groupe : de sa fondation en 1979, à la séparation en 1986 et à la reformation en 2020. Une histoire très particulière dans l’histoire du rock d’ici puisque le groupe a été un des pionniers du renouveau de la musique française du début des années 80 et il aura fallu toute l’énergie d’Olivier pour que le groupe retrouve, enfin, sa place.

Bienvenue dans l’histoire de ces « héros oubliés de la New Wave » française qui ont retrouvé le chemin de la scène, avec talent et brio, que ce double Live sait parfaitement le retranscrire !

Droits réservés

Olivier : "Cette photo fut prise lors du tout premier concert du groupe en 1979 à la fac de Science de Toulouse (UPS). Il me semble que c’était pour la fête de l’INSA (une des écoles d’ingénieurs sur le Campus). En 1979, je suis le seul membre majeur du groupe. Chris que l’on voit à gauche avec sa basse Rickenbaker et son perfecto est encore lycéen au Lycée Bellevue juste à côté. Il a acheté sa basse 6 mois plus tôt pour rejoindre le groupe sans jamais avoir joué avant. Alain, le batteur, que l’on ne voit pas, est le plus jeune des trois, mais c’est un cogneur surdoué. Sur cette photo, j’ai encore ma toute première guitare électrique, une Stratocaster. Je l’ai revendue à la fin de cette année-là pour acheter une Telecaster plus en harmonie avec mon style. Pour ce premier concert nous jouions en ouverture, dans l’après-midi devant un parterre clairsemé, moitié étonné, moitié rigolard. Il faut dire qu’à Toulouse en 1979, il y a principalement des bluesmen chevelus et des jazzrockeux prétentieux qui ne jurent que par la virtuosité. Il ya aussi de la variété et il y a « Dieu » (Nougaro). Autant dire que quand on leur envoie « Harry », « Tonton Macoute » et « Retourne à l’école », avec notre look, on peut lire l’incompréhension sur les visages… Les élèves ingénieurs de l’organisation, eux étaient sympas et plutôt évolués (la preuve ils nous ont laissé jouer …). L’un d’eux a répété deux ou trois fois « Même les petites filles me jettent des pierres » pour évoquer l’organisation du concert. C’était son expression favorite. Ça m’a donné l’idée d’écrire un morceau avec ce titre en rentrant chez moi (j’habitais le quartier de Rangueil, à côté de la fac)."

Droits réservés

Olivier : "C’est une photo émouvante pour moi. Elle est prise dans les loges du Gibus avec Alain Manneval, avant ou après un concert en 1983. Alain était quelqu’un de vraiment bien. Il a beaucoup compté pour nous. On voit Dorian, notre batteur, assis au milieu. Il venait de remplacer Alain de Joie quelques mois plus tôt. Chris (à droite) est toujours là mais il s’était mis au claviers et Daniel (au centre de profil) avait pris la basse. Je suis à gauche avec une cigarette comme dans « Ultime Pogo ». Nous avions fait du chemin depuis la sortie d’Adieu Paris en 45T (début 1982) malgré le départ d’Alain de Joie (fin 1982). Les Radios Libres nous avaient adoptés et puis Alain Manneval, qui était probablement le seul journaliste d’une grande radio à écouter son coeur plutôt que le système, a décidé de passer Adieu Paris et de nous inviter pour une interview alors que nous étions des inconnus. A partir de là, tout a changé pour nous, pour le meilleur et pour le pire. Nous avons signé sur un gros label (Phonogram, le même que Gainsbourg) mais ils nous ont imposé une production grand public, à la « Duran Duran » sans vraiment écouter nos attentes. C’était frustrant et le groupe s’est divisé et a explosé. Daniel est parti en 1984 après l’enregistrement de « Tonton Macoute » et nous avons splitté en 1985 après une autre séance de studio (cette fois avec Frank Darcel comme producteur mais il ne nous écoutait pas non plus) et une dernière tournée et avant même d’enregistrer l’album prévu pour 1986."

Droits réservés

Olivier : "C’est une photo prise en 1983 au jardin des plantes de Toulouse. On y voit presque tout le monde. C’était avant de partir en tournée et il manque Marco (le saxophoniste que nous avons rencontré en Bretagne lors de la tournée). De gauche à droite : Chris de Joie (éternel introverti, il est déjà devenu un geek des claviers) ; Daniel de Joie (notre bassiste, dingue de soul, qui a eu une influence majeure sur l’évolution du style du groupe) ; Pascal Jouxtel (mon alter ego avec qui nous avons écrit beaucoup de textes dont celui d’Adieu Paris) ; Moi-même (guitariste et chanteur par défaut comme beaucoup de la génération « post-punk ») ; « Carlos » notre roadie (Jean-Pierre Carles, étudiant en audio-visuel à Angoulême à l’époque), éternel rigolard et positif, Carlos cuisinait super bien, réglait les problèmes et remontait le moral de tout le monde en tournée ; Dorian Chaillou qui avait remplacé Alain de Joie à la batterie (Alain avait quitté le groupe fin 1982, à la fin d’un concert au grand Parc de Bordeaux). C’était un bon batteur mais très différent d’Alain. Lui aussi venait de Charente ; Enfin, Jean-Marc Besson qui est le troisième charentais. Comme Carlos, c’était un copain de Dorian. Il est rapidement devenu notre « manager ». Il avait note âge et a appris le métier avec nous."

Crédit : Marc Henry

Olivier : "C’est une photo que j’aime beaucoup, prise lors de l’hiver 1986 à Paris. Le groupe avait splitté en 1985 et Marc et moi étions les deux seuls rescapés du groupe. Après la déconvenue de Phonogram et le départ de Daniel puis de Chris et Dorian, nous sommes retournés à nos bases : écrire (à Landévennec, au fond de la rade de Brest) et enregistrer tout nous-même (à Paris). Un copain (Marc Henry, celui qui a pris cette photo) connaissait des gens chez Libération (le quotidien). Cela nous a permis de nous installer dans les locaux déserts de Radio Libération pendant plusieurs semaines. Là nous avons maquetté et enregistré des titres comme « Nous ne dansons plus la nuit », « Allongé sur la dune », « Comme un animal », « Le bon Dieu n’a pas voulu de moi » ou une nouvelle version de « Un bâton de rouge pour Greta ». Des enregistrements qui nous ressemblaient mais qui ont failli se perdre quand nous avons jeté l’éponge pour passer à autre chose à la fin de cette année-là. Pourtant, l’histoire nous a rattrapés et la plupart des titres se sont retrouvés sur l’album « Nous ne dansons plus la nuit » paru en 2023."

Crédit : Nini Venin

Olivier : "C’est une photo prise au « CAFI » avec mon vieux camarade Francis Seusse (« Sit »). Francis m’a invité a venir y chanter à l’été 2023. Le CAFI, c’est le « Camp d’Accueil des Français d’Indochine. En 1956, ce camp a accueilli des familles mélangées et rapatriées après la défaite de Dien Bien Phu. Les pères étaient souvent d’anciens militaires mariés à des Vietnamiennes. Les conditions de vie y étaient difficiles et l’intégration au cœur du Lot et Garonne n’étaient pas simple pour ces familles mélangées. Francis et moi on est copains depuis nos 20 ans. Comme moi il est passé par la révolution punk et comme lui je suis un déraciné, un enfant de la décolonisation. Je me suis toujours senti différent. Comme tu sais j’avais écrit « Indochine souviens-toi » pour Francis et mes amis du camp. En 2023 pour les remercier de l’invitation, j’ai écrit un autre titre, plus poétique je crois, « Extrême-Orient » que j’ai chanté ce soir-là pour la première fois."

Crédit : Nini Venin

Olivier : "C’est une photo prise en 2020 je crois, Quai de Valmy, le long du Canal Saint-Martin à Paris. Je venais pour tourner des images pour le clip de « Rien ne sera plus comme avant ». À l’époque, j’étais seul. J’écrivais toujours et j’enregistrais dans mon coin mais je ne savais pas que j’allais reprendre l’aventure avec les Fils de Joie. Pourtant, il y a avait un tagueur sur ce mur et je lui ai montré le logo des Fils de Joie. Il l’a bombé à l’arrache et c’est Nini, mon épouse, qui a pris la photo."

Crédit : Artwork JackP4

Artwork JackP4
Olivier : "Ça c’est la pochette de notre album paru en février 2023 avec le Label toulousain indépendant Pop Sister Records. La plupart des morceaux qui figurent sur cet album sont des enregistrements auto produits entre 1982 et 1986 sauf « Ultime Pogo » un titre nostalgique écrit en 2018 qui parle de notre jeunesse et de nos rêves. Le label a choisi le titre « Nous ne dansons plus la nuit » qui est aussi celui d’un morceau de l’album et un hommage à Ian Curtis. C’est une longue histoire mais disons que j’ai écrit ce titre alors que j’effectuais mon service militaire chez les parachutistes en 1980 (Toulouse était blindée de régiments para). C’était une parenthèse forcée pour mes rêves de musicien et disons que je n’avais pas un gros moral. Quand j’ai appris le suicide de Ian Curtis, j’ai décidé d’écrire « We’re not dancing anymore », sur le thème des musiciens disparus, un peu à la manière de « Sweet soul music » que Jam avait repris en 1977. Plus tard, en 1986, j’ai réécrit le texte en Français et nous l’avons enregistré au studio de Radio Libération à Paris."

Crédit : Nini Venin

Olivier : "Cette photo a été prise à « La gare routière » de Montauban en 2022. Le patron, Philippe, est un mec bien. Quand il a appris que nous avions l’intention de relancer les Fils de Joie et de jouer un samedi soir au Bar rock le Ravelin à Toulouse, il m’a contacté et proposé de jouer la veille dans son établissement. Bien sûr, on a accepté avec joie. Le plus drôle c’est qu’avec le COVID, Le Ravelin a reporté le concert mais Philippe ne s’est pas dégonflé et nous non plus. Ce fut le tout premier concert de notre retour. Le premier avec Jomo. Lui et moi on est copains depuis notre époque lycéenne et punk (1978). Il jouait dans « Caniveau », moi déjà dans Les Fils de Joie mais on faisait scène commune parfois. Mes anciens acolytes de Joie étaient perdus pour le rock mais quand j’ai appelé Jomo pour reformer le groupe il a dit oui tout de suite. C’était évident pour lui et moi."

Crédit : Jean-Marc Mercier

Olivier : "Ça c’est une photo prise en Gironde avant un concert à l’été 2023. On y voit Guillaume Thiburs notre batteur à gauche. Guillaume est bien davantage qu’un batteur. C’est un musicien complet, multi instrumentiste et pro du son. Grace à lui, on manie les séquences d’orgue et on a retrouvé le son originel des Fils de Joie. Il y a une génération d’écart entre nous mais il est encore plus fan de notre style ou de nos titres que nous. On est redevenus un vrai groupe. A chaque concert nous jouons les classiques des Fils de Joie et glissons systématiquement de nouveaux titres. Le tracteur c’est un clin d’œil à nos amis du Massey Ferguson Mémorial. La photo est prise quelques semaines avant le concert commun que nous avons donné à la Dame de Canton à Paris fin 2023. Nous y avions joué « Varsovie » un titre des Rosemary’s babies, écrit par Jomo que Chris Ferguson adore (c’est le guitariste et leader du MFM). Nous l’avons chanté tous ensemble. Cette version figure sur notre album live qui vient de paraitre, tout comme « Indochine souviens-toi » avec le couplet sur Tai Luc. C’était juste une semaine avant son décès. Depuis on dédicace le titre à Tai Luc quand on le joue mais on dédicace « Extrême-Orient » à nos amis du CAFI."

Crédit : Artwork : Pooley, Woom Studio

Olivier : "Ça, c’est la couverture de notre nouvel album live, sorti le 14 mars 2025 chez Twisted Soul Records. Nous avions enregistré quasiment tous les concerts depuis deux ans en vue de cet album. C’est un double album avec 22 titres dont tous nos classiques et quelques inédits. Le nouveau titre le plus important à mes yeux c’est « Mon frère Pierrot ». En 2023, nous jouions à la Dame de Canton, une authentique jonque et c’était l’anniversaire de la disparition de mon frère qui était marin. C’est une chanson qui raconte son histoire et je voulais la chanter là-bas, sur un bateau."

Crédit : Philippe Boyer

Olivier : "Cette photo fut prise le 1er Mars 2025, au METRONUM de Toulouse lors d’un concert de retour aux sources. Il y avait 400 personnes dans la salle et pas mal de monde sur scène (jusqu’à 14) … Nous n’avions pas de première partie mais on voulait revisiter le répertoire des Fils de Joie avec nos amis dans la ville qui nous a vu naitre en tant que groupe. Il y a eu des moments forts et c’était parfois le bordel mais dans une ambiance formidable. On a joué 28 titres pendant deux heures vingt de concert. On en a profité pour recruter trois nouveaux membres qui était présents ce soir-là : Fred Damiens dit « Coudâm » au saxo. Le saxo fait partie de l’ADN des Fils de Joie. Fred est un mec cool et il a un son incroyable. Il a aussi un sacré pédigrée. Fred a joué avec Jacno, sur trois albums de la Souris (LSD, dont le mythique live au Bataclan de 1989) et avec Cyclope. Nous avons aussi recruté Charly (Charles Ash) un mec en or, super guitariste, humainement, on s’entend très bien et c’est aussi un très bon chanteur. Il est de la génération de Guillaume (avec qui il avait fondé Red Lips) et était fan des Fils de Joie. On a aussi recruté Stephan Bertholio, qui joue de la basse avec Dionysos, qui jouera avec nous des claviers, de la guitare et de la basse. Stéphan nous a accompagnés sur scène au Metronum, c’est une figure du rock toulousain et un super mec lui aussi. On ira en studio et on va continuer de tourner cette année. Le vendredi 19 décembre nous serons à Paris au Petit Bain."

https://lesfilsdejoie.net/
https://www.facebook.com/lesfilsdejoie
https://www.instagram.com/lesfilsdejoie/
Pour commander le disque : https://www.shop.twistedsoulrecords.com/accueil/68-les-fils-de-joie-en-public.html