Marlow Rider : Cryptogenèse ou un concentré de rock !

vendredi 15 septembre 2023, par Franco Onweb

Il y a deux ans, Tony Marlow lançait son nouveau projet : Marlow Rider. Un projet ambitieux mais très risqué artistiquement puisqu’il s’agissait de mélanger le rock’n roll des années 50, 60 avec le blues rock des années 60 et 70, bref de faire la rencontre entre Jimi Hendrix et Elvis ou encore Cream avec Scotty Moore. Le premier album avait permis de poser les bases de ce mélange inédit et voici qu’arrive ce deuxième album « Cryptogenèse » qui montre à quel point Tony a réussi son pari.

« Cryptogenèse » est un vrai concentré de rock et on sent à l’écoute du disque à quel point Tony et ses musiciens ont travaillé. Aidé du producteur Seb Le Bison, ils ont réalisé le disque qui est le crossover parfait de toutes ces musiques. Un album où pour la première fois Tony se raconte sur sa vie et son parcours avec une honnêteté touchante ! Bref un album parfait contre la morosité actuelle. C’est aussi, et il faut le noter, la dernière participation de Fred Kolinski le batteur de Tony qui depuis nous a malheureusement quitté.

Pourquoi as-tu appelé l’album « Cryptogenèse » ?

C’est un mot qui n’existe pas et que j’ai inventé ! C’est inspiré de la Genèse biblique avec le monde créé en six jours par Dieu et crypto vient du latin, ça veut dire coder, deviner… C’est ma jeunesse et mon adolescence que je raconte notamment dans la deuxième partie du disque. C’est donc une genèse cryptée.

Tony Marlow
Crédit : Thierry Lerendu

Sur ce second disque de Marlow Rider tu maîtrises beaucoup mieux cette musique de la fin des années 60 et du début des années 70 ?

C’est vrai que le premier était une sorte de « galop d’essai », on essayait de reproduire cette musique très influencée par Hendrix et Johnny Winter. Jouer ce style avec une contrebasse était nouveau et cela nécessitait pas mal de recherche au niveau de la prise de son. Sur ce second disque, on maîtrise beaucoup mieux le studio et les arrangements.

A la première écoute du disque on entend du rock, du blues mais aussi, et c’est très nouveau chez toi, du psychédélisme.

Il y en a dans le premier mais là c’est plus abouti et il ressort mieux.

Le disque est construit en deux faces, avec en face A ton amour pour cette musique avec deux reprises (Cream et Hendrix) mais aussi un instrumental et en face B des textes en français où pour la première fois, tu te racontes. C’est presque un disque concept ?

Oui, la face A est tout en anglais et la face B est tout en français. Il y a un titre qui ouvre l’album qui peut rappeler Led Zeppelin, le titre suivant c’est un peu les Doors, ensuite un titre « Libertad » qui rappelle le rock latin de Carlos Santana et enfin l’instrumental « Javarock » qui est un mix entre le jeu de guitare de Clapton et de Hendrix. Ensuite, sur le vinyle on retourne le disque et on arrive dans la cryptogénese où je me raconte de l’enfance à la fin de l’adolescence.

On retrouve aussi une influence de T Rex !

Tout à fait sur « Doctor Spike », le deuxième titre peut rappeler quelques morceaux de T Rex.

Tu es un peintre qui aurait agrandi sa palette de couleurs ?

Tout à fait et comme j’ai une bonne blouse ça fait son effet (rires).

Tes textes en français sont assez touchants. Tu te livres sur ce disque et c’est la première fois que tu le fais ?

Je l’avais fait un peu avant mais par de petites touches. Là ce sont des textes très personnels et c’est pour ça que j’ai choisi le français : tout le monde peut comprendre ! C’est plus direct ! Ça vient de l’âge peut-être. Je commence à me retourner sur mon vécu !

Tu as mis deux reprises, pourquoi ?

J’adore l’art de la reprise ! Quand c’est bien fait, c’est noble et c’est bien de rendre hommage à ces grandes influences et comme les fils rouges de Marlow Rider sont quand même Hendrix et Clapton, période Cream on retrouve « Highway Chile » et « Sunshine of your love », c’est pour moi sa meilleure période. Ces reprises ont un sens. C’est une clef pour savoir dans quel univers on évolue !

Mais tu es un des seuls en France à pouvoir faire sonner n’importe quel titre de manière impeccable ?

Merci de le penser, je ne sais pas si je suis un des seuls , mais en tout cas, j’essaie toujours de mettre ma patte personnelle, tout en respectant l’esprit de l’original.

Maintenant, tu travailles avec Seb Le Bison. Il est presque devenu ton réalisateur attitré ?

La personne avec qui je travaillais avant Lucas Trouble, sorcier du Kaiser Studio, nous a malheureusement quittés en 2016, j’étais à la recherche de quelqu’un et Seb m’avait dit qu’il serait content de collaborer avec moi. Ça s’est fait comme ça, je l’ai appelé et voilà. En plus ça nous permet de rester à Montreuil parce qu’il travaille au studio le Cargo. La première réalisation « First Ride » s’est très bien passée, on a continué avec l’album d’Alicia F ! et ce disque. On peut rester chez nous à Montreuil et comme on est très satisfait de son travail, tout va bien !

Vous l’avez enregistré en combien de temps ?

Les prises ont été enregistrées en quatre jours et ensuite, on prend trois jours pour les arrangements et plusieurs jours pour le mixage. En tout, on a du faire une dizaine de jours de studio.

C’est un disque avec pleins d’effets, des chœurs, des ajouts de guitares…

Oui, on s’est vraiment fait plaisir. Il y a les premiers éléments que l’on entend et ensuite il faut tendre l’oreille pour entendre le reste. Cela donne du relief à la production et cela fait que le disque n’est pas plat.

C’est aussi la dernière participation de ton batteur Fred Kolinski ?

Il nous a quittés le 16 mai dernier ! L’album a été fait un an avant mai 2022. Il avait beaucoup travaillé les parties de batteries, les percussions et malheureusement, il a fait un AVC en octobre 2022. Il a voulu continuer à jouer, même affaibli jusqu’au moment où le corps n’a plus suivi. C’est son dernier album, un très beau disque… C’est un beau témoignage du talent de Fred…

Amine Leroy
Crédit : Thierry Lerendu

Il y a un contrebassiste, Amine Leroy, ce qui est très original pour cette musique ?

C’est l’homme de la situation que l’on n’attendait pas puisqu’il joue d’un instrument très original et inattendu pour cette musique ! Amine a un passé très psychobilly. Il a joué dans les années 90 avec Banane Metalik un groupe qui a eu son succès. Avec toutes ces années, il a acquis la maîtrise du slap, la façon de claquer les cordes sur le manche. C’est un maniaque du son, des gammes et il a l’esprit ouvert, curieux et aventureux…. Beaucoup de contrebassistes veulent rester dans leur zone de confort musical : jazz, rockabilly mais surtout pas lui… Sur ce disque, il a inventé une nouvelle façon de jouer. Quand tu reprends Cream avec une contrebasse, tu es obligé de trouver des formules rythmiques inédites. Il a aussi un jeu qui va sur du funk. C’est un très grand musicien et donc bravo à lui !

C’était risqué de faire ça ?

Oh oui, c’est se mettre en danger et surtout on risquait de se faire critiquer.

Mais c’était une volonté de ta part de garder un contrebassiste ?

Oui, ça fait la jonction entre mes années rockabilly et cette musique que j’écoutais adolescent. Marlow Rider est une sorte de rock total ! Il y a le côté classic rock de mon adolescence mais aussi le rockabilly avec ce son de contrebasse. Au niveau de mon jeu de guitare, comme sur l’instrumental « Javarock », je mélange des sons de Clapton avec des ponts de Hendrix mais aussi du picking rockabilly à la Scotty Moore. C’est vraiment toute la musique que j’aime.

Tu as dû beaucoup travailler la guitare pour arriver à ça ?

J’ai commencé comme batteur et je me suis mis à la guitare il y a 30 ans. Tous les matins quand je me lève, je joue, je travaille l’instrument… J’ai travaillé le jeu rockabilly mais aussi celui blues rock d’Hendrix, de Johnny Winter et beaucoup d’autres... En plus, comme je fais partie d’Alicia F, j’aii aussi travaillé tout le côté rock énervé de la fin des années 70. J’arrive aujourd’hui à maîtriser 50 ans de guitare.

Comment ton public de base, celui du rockabilly, a pris ton virage musical de Marlow Rider ?

Pour moi, Marlow Rider n’est pas une rupture mais une continuité ! Il reste toujours un côté Rock’n Roll mais mêlé à d’autres choses. Les puristes n’aiment pas et les autres me suivent… mais je le savais dès le départ. Je touche un autre public, plus large… Tant pis pour les puristes, les dogmes m’ennuient et franchement si c’est pour refaire ce qui a déjà été fait artistiquement cela ne m’intéresse pas. Quand j’ai travaillé avec Seb SF Sorrow pour Rockers Kulture, on mélangeait déjà les styles. Je n’ai rien contre la musique des puristes mais ce n’est pas ma démarche !

Tu proposes quoi comme formule pour des concerts ?

On propose principalement Alicia F et Marlow Rider mais j’ai toujours un trio de Rockabilly pour les fans où j’assume mon passé dans ce style.

C’est quoi tes prochaines dates ?

Le 24 septembre à côté de Nantes en trio rockabilly, ensuite avec Alicia on va jouer à la Boule Noire en première partie d’un guitariste Pat O’May et le 13 octobre à Montreuil on fait un plateau commun au Cri du Singe avec les deux formations, Alicia F et Marlow Rider . Maintenant, suite au décès de Fred, nous avons deux batteurs : Jacques Charret pour Marlow Rider et Gérald Coulondre pour Alicia F.

Jacques Charret
Crédit : Thierry Lerendu

Tu comptes t’arrêter où musicalement ?

Au niveau du style ? Là, j’englobe tout ce que j’aime. Il y a encore pas mal de choses à explorer dans ces styles et à créer, je crois que j’ai de quoi m’occuper jusqu’au bout (rires). J’ai encore de belles années devant moi !

Tu pourrais enregistrer avec un Big Band comme l’a fait Brian Setzer après les Stray Cats ?

J’ai déjà fait des albums de swing mais bon ce serait intéressant par contre, il faut trouver un producteur qui paye 20 musiciens. (rires)

Ta pochette est très belle, on est vraiment dans le psychédélisme !

C’est Tristam, l’ancien chanteur des Guilty Razors qui l’a fait. C’est un artiste de Montreuil qui a travaillé avec les Musulmans Fumants, un collectif de peintre. Tout l’habillage a été ensuite réalisé par Seb Le Bison. On ne peut pas tout faire et donc je préfère déléguer aux gens qui savent maîtriser.

A quand un disque live ?

Ce serait bien un DVD, pourquoi pas ?

Crédit : Thierry Lerendu

C’est quoi vos projets ?

Pour Marlow Rider c’est de jouer le plus possible et on travaille sur le nouvel album d’Alicia F. On a bien avancé : on a toutes les compositions. On espère l’enregistrer au début 2024 pour une sortie à l’automne.

Le mot de la fin !

C’est mon disque préféré, c’est aussi le dernier que j’ai fait et j’espère qu’il aura la reconnaissance qu’il mérite. Il se démarque dans le paysage musical français, je pense. Il a reçu un bon accueil et ça fait plaisir.

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