Pouvez-vous, vous présenter ?
Clément, guitariste des Vogs depuis quatre ans
Tanguy, je suis à la basse et ça fait deux ans que je suis dans le groupe
Nadia, je suis dans le groupe depuis sa création. J’ai commencé dans les chœurs et je suis au chant lead depuis fin 2019.
Ludovic, je joue des claviers dans le groupe depuis sa création en 2017.
Jérôme, batteur, je suis le petit nouveau, je suis arrivé dans le groupe il y a presque un an.
Comment a commencé le groupe ?
L : Je suis le fondateur du groupe qui est né en partie à la suite de l’arrêt de The Adelians. Certains musiciens voulaient continuer autour d’un répertoire plutôt sixties. On est donc reparti avec certains anciens membres et Nadia qui a intégré le groupe.
Vous définiriez comment le groupe en termes d’influence ?
C : (rires) Ce n’est pas évident, il y a beaucoup de choses qui se croisent. On va dire que c’est la musique des années soixante avec une base Soul très présente. Il y a des ajouts de sixties français et de rhythm’n blues… On ne fait pas que de la Soul, même si nous sommes sur un label de Soul…
Mais vous perpétuez l’héritage des chanteuses Soul des années soixante comme Nicoletta ou Jacqueline Taieb ?
L : Je suis d’accord et on assume complètement. Avec Q Sounds on a toujours essayé de poursuivre le travail des chanteuses de Soul en France dans les années 60. Ce sont des tentatives de Soul parce que cette musique n’est pas née en France. Je voudrais rajouter Eddy Mitchell ou Herbert Leonard. Il y a aussi des chanteuses ou des groupes comme Tienou ou un groupe vocal comme les Princesses, qui étaient des Supremes à la française. Elles ont vraiment essayé de mélanger des genres , comme la pop ou le Yéyé, pour arriver à faire de la Soul à la Française.
Vous jouez avec d’autres groupes de Q Sounds ?
N : Chez les Vogs, il n’y a pas de Crossover avec d’autres groupes mais on fait tous partie des Supertights, qui est le All Stars du label au sein duquel chacun peut venir participer au gré de ses envies, possibilités, opportunités etc...
Mais vous pourriez être dans la scène Mod Française comme French Boutik ou le Chiffre Orga-Nisation ?
C : Je connais cette scène. Je viens de la scène Garage Mods. J’ai joué avec des groupes de cette mouvance comme les Carpets Sellers. Je ne trouve pas qu’il y a une vraie scène. Ce sont de bons groupes mais ils sont trop isolés pour qu’il y ait une vraie « scène ».
L : Je ne suis pas Mod, même si j’aime en grande partie la même musique que les Mods. ce serait pour moi une forme d’usurpation de me définir ainsi. Personnellement je viens du Hip Hop. Il est clair néanmoins que The Vogs est un groupe qui a tout pour plaire à cette scène et ce public, et c’est tant mieux.
Vous avez fait un premier album en 2018 ?
L : Oui, suite à la disparition de The Adelians qui étaient un super groupe avec une très grande chanteuse, Florence, qui a voulu arrêter. Le reste du groupe a voulu continuer, donc on a écrit des morceaux, on a recruté une chanteuse, Elodie et puis on a enregistré le disque. Pour moi c’était un album de transition où nous étions plus sur de la Northern Soul que maintenant où nous essayons vraiment de retrouver l’esprit sixties Français. On devait faire cette transition par rapport aux Adelians qui avaient seulement quelques morceaux en Français. Nadia qui a repris le lead a une personnalité vocale bien plus adaptée à ce que nous faisons maintenant. Le groupe a traversé beaucoup d’aventures et de péripéties assez incroyables en fait.
Ce nouvel album est donc vraiment les Vogs ?
L : Oui, là on est vraiment un groupe !
Vous avez tourné après le premier album ?
N : On a fait des soirées« Plus de Soul » à Pantin, on a joué à Montreuil, en province et en Allemagne
L : Il y a eu le Covid qui nous a bloqués… comme tout le monde !
C : On a un peu joué à Paris à La Boule Noire, à l’International et puis on va jouer au Sunset.
Il a été fait ou votre disque ?
L : Au studio La Forge avec Tom VDH qui est un peu notre ingénieur du son attitré chez Q Sounds. On l’a fait sur bandes comme d’habitude. Je l’ai mixé avec Jérôme Makles. On a aussi masterisé le disque tous les deux. Jérôme joue dans The Supertights et Principles of Joy. C’est comme ça chez Q Sounds (rires).
Sur votre disque, la première chose que l’on remarque c’est l’amplitude du son, notamment avec des cuivres. C’était une volonté du groupe ?
T : Oui, c’est un des éléments de cette scène. Cela donne un plus à notre son, qui nous ravit. Ça donne un super truc sur scène. C’est vraiment à voir !
C : C’était une opportunité pour nous, presque un hasard, ce sont des gens qui cherchaient un beau projet et franchement c’est énorme !
L : Ça inscrit l’album, vraiment dans une tradition Soul. Sur scène on joue plus souvent sans cuivres, ce qui accentue le côté beat/garage du groupe en live.
Pourquoi il s’appelle « Du fond du cœur » ?
L : C’est Christelle (Amoussou, ndlr) qui est notre auteure qui a trouvé le titre également parce qu’elle trouvait que cela correspondait bien à l’émotion que les titres dégageaient et à l’histoire du groupe. C’est vraiment un album qui vient de loin, du fond du coeur. Il a été long à se mettre en place.
Quand on écoute « Ouvre ton coeur » et « Sors de ma vie » ce sont des tubes, des vrais !
N : Merci, on veut faire des titres dansants, énergiques et sincères. C’est ça notre première intention. Si c’est des tubes, tant mieux !
Vous avez un vrai potentiel commercial ! Pourquoi chantez-vous en français et surtout quand vous chantez en anglais vous avez une vraie spiritualité qui sort de vos titres ?
N : J’aime bien chanter en anglais mais c’est plus dur pour moi parce que ce n’est pas ma langue maternelle. Ludovic et Christelle me disent que ma voix s’adapte plus naturellement au Français donc la majorité de nos morceaux sont en Français. Je trouve ça bien parce que pour moi, c’est un sacré défi de faire aimer la Soul en Français.
C : On est un peu à contre-courant de ce qui se fait à l’heure actuelle avec des textes en Français qui ne sont pas forcément des textes supers compliqués où on recherche la littérature ou le jeu de mots. Nous, on veut faire de la pop, au sens premier du terme. Quand en anglais on dit « Baby I love you » ça sonne et nous on veut prouver que ça peut sonner aussi en Français. Ce n’est pas toujours bien perçu de chanter en Français surtout quand on a des textes simples ou premier degré.
Quand Nadia chante en anglais, ça donne un côté plus spirituel ?
L : Je pense que ça vient du fait qu’on n’a pas l’habitude d’entendre de la Soul en français. Pour moi on a un imaginaire beaucoup plus riche qui se déclenche inconsciemment dès que cette musique est chantée en Anglais. Cet imaginaire est nourri de beaucoup de fantasmes, romantisme, imageries, clichés même … colportés par la manière dont est présentée la musique noire américaine en France. Avant que ça fasse la même chose avec le français il faudra que de nombreux disques du genre chantés en français soient produits, diffusés et appréciés. Il faudra que des gens te disent, moi j’écoute que de la Soul en français. Là on ne se posera même plus la question (comme pour le Hip Hop)
Mais il y a eu beaucoup de Soul en Français dans les années soixante qui continuent à être diffusés ?
L : Je suis d’accord, il y a eu pleins de tentatives de Soul à cette époque avec des chanteurs comme Herbert Léonard, Eddy Mitchell ...Il faut aussi dire qu’alors, la Soul était le style dominant sur le marché américain et beaucoup de producteurs français ont pensé que ça pouvait faire aussi un carton en France. Il y a eu quelques gros succes autour d’adaptations (Claude François, Sylvie Vartan, Franck Alamo …). Certains de ces chanteurs étaient de vrais fans de musique noire américaine (E. Mitchell, H.Léonard, Nicoletta...) mais rapidement tout ce beau monde est retourné à la variété/chanson parce qu’il n’y a pas eu le retour commercial attendu. Donc cette musique, chantée en Français, s’est rapidement éteinte dès la fin des années soixante même si plein d’artistes célèbres par la suite ont commencé en chantant de la Soul, du R’nB ou du Beat.
Qu’est ce qui va se passer après le disque ?
L : On va chercher à jouer à Paris et en province d’ici à l’été mais c’est difficile de trouver des dates et de programmer ce genre de répertoire en France.
Qui compose ?
L : C’est moi qui compose tous les instrus et Christelle écrit les textes et mélodies… comme souvent d’ailleurs chez Q Sounds (rires) !
Mais les autres peuvent-ils intervenir ?
C : La question ne se pose pas forcément ! Ludo a une telle qualité et une telle maturité dans l’écriture que franchement c’est bien comme ça. Moi, ça me change. Avant avec mes anciens groupes on devait écrire les morceaux, les élaborer en répétition... Là, je suis dans un confort parfait avec un répertoire qui tourne. Pour les Vogs la question ne s’est jamais posée, même si on fait des choses à côté.
L : Chacun apporte tout de même sa touche et son son. Bien que j’amène les compos, il y a toujours un espace de créativité lié au style de chacun. Par exemple Clément va amener son jeu très Garage et épuré, Jérôme, notre batteur actuel, n’a pas la même frappe que Jean-Baptiste son prédécesseur...
N : L’écriture, je trouve ça un peu compliqué et je laisse ça aux professionnels. Ce ne serait pas plus facile pour moi de chanter mes propres mots et je trouve ça très beau de pouvoir bien interpréter les textes des autres.
Il n’y a donc pas de frustration ?
C : Moi si j’écrivais des morceaux, je ne saurais pas écrire dans ce style.
L : Avoir des auteurs-compositeurs c’est ce qui nous relie vraiment à la Soul. La plupart des grands chanteurs de Soul n’écrivent pas leurs morceaux. La plupart des grand label du genre ont toujours eu des équipes d’auteurs compositeurs qui fournissaient groupes et chanteurs en chansons.
Tu écris pour beaucoup de groupes du label : tu arrives à trouver la différence entre chaque groupe ?
L : Absolument !
C’est quoi alors pour les Vogs ?
L : Je vais répondre un peu techniquement : c’est un groupe où il y a peu d’accords complexes, quelques accords de blues. C’est beaucoup d’accords à trois sons mais peu d’accords à quatre ou cinq sons comme ceux que tu vas trouver chez Motown dès la fin des années soixante par exemple… On veut garder une simplicité harmonique, beaucoup plus que chez d’autres groupes du label. Je veux ajouter que Christelle a aussi le talent de pouvoir adapter son écriture à chaque groupe ou chaque chanteur/chanteuse.
Autre question : l’image ! Vous êtes très élégants sur scène et sur vos photos ?
N : Oui, c’est une volonté de notre part d’avoir la classe comme les groupes de Soul des années 60 et 70. Contrairement à beaucoup de groupes actuels, on revendique d’être élégants.
L : Marre de ces mecs qui montent sur scène comme s’ils allaient s’acheter un grec !
Je reviens dessus mais vous êtes conscients que vous avez un vrai potentiel populaire ?
L : Oui, je pense intimement que tous les groupes de Q Sounds ne sont pas à la place qu’ils méritent. Chez les Vogs il y a un vrai potentiel avec des refrains qui restent en tête et des morceaux efficaces. Malheureusement on n’a pas les moyens financiers ou médiatiques de développer nos groupes comme on le voudrait et l’accès aux médias main stream est très verrouillé .
C : Il y a une vraie absence d’illusion en ce qui concerne la musique ici ! On sait bien comment est développée la musique en France. La pop au sens large a une mauvaise image.
L : On revendique de faire de la pop grand public. Le problème en France c’est que dès que l’on touche à la pop, on essaye de la mélanger avec de la chanson française avec des textes un peu …alambiqués. Ce n’est pas notre cas. Je crois aussi qu’on n’est pas branchés : on vient de banlieue et on n’a pas l’attitude parisienne.
Quel disque doit-on écouter pour apprécier les Vogs ?
N : Difficile pour moi, parce que c’est vraiment en entrant dans le groupe que j’ai appris à apprécier la Soul en Français. Mais je dirais Marvin Gaye ou Aretha Franklin.
C : Mon disque français préféré c’est Eddy Mitchell, « Sept colts pour Schmoll »
T : Personnellement, j’adore les cuivres notamment James Brown, j’adore Al Green mais surtout Baby Huey. J’adore le mélange de la culture Soul / Hip Hop, notamment les compilations Shaolin Soul.
J : Les Meters !
L : Je citerais deux artistes : Manu Dibango pour tout son travail autour de la Soul du R’nB et du Jazz Funk en France à la fin des années 60. Je vous conseille d’ailleurs de voir les émissions « Pulsations » diffusées à la Télévision française à cette période, dans lesquelles sont groupe officiait. Je dirais aussi le premier album d’Herbert Léonard qui est un des rares disques de l’époque à revendiquer la Soul comme genre et à proposer des compos en plus des adaptations.
Vous faites des reprises sur scène ?
L : On fait les reprises et adaptations présentes sur le disque . « Sors de ma vie » est l’adaptation du mythique « You keep me hanging on » des Supremes. On joue également une reprise d’un morceau de Fernand Bonaz (« Là ») et « Cette Lettre Là » de Sylvie Vartan.
Pourriez-vous aller jouer aux USA ?
C : Ça ferait loin (rires) ! C’est un peu le rêve pour un musicien français de tourner aux USA mais on sait aussi que c’est très dur.
L : Jouer aux USA pour un groupe de Soul c’est un peu comme pour un basketteur français de jouer en NBA ! Ce serait déjà pas mal de jouer régulièrement en France !
Pourriez-vous sortir un Live ?
L : Tiens, on en parlait il y a quelques semaines. Ce n’est pas encore à l’ordre du jour, mais on aimerait bien.
Le mot de la fin
N : J’espère qu’un jour on reconnaîtra enfin le potentiel de Q Sounds.
C : Achetez nos disques et faites nous jouer !
T : Vive la musique Live et allez voir The Vogs c’est très bien !
J : Long Live Rock’n Roll et Soul Music !
L : Venez nous voir jouer, soutenez la musique indépendante et Merci Buzzonweb pour cette interview !
Un très grand merci à Gérald Chabaud
https://www.facebook.com/thevogsofficial
https://q-soundsrecording.bandcamp.com/album/the-vogs-du-fond-du-coeur