Laurent Charliot, le conteur du rock avec Rock Stories Tome 2

vendredi 6 octobre 2023, par Franco Onweb

Depuis les années 50, le rock, et les Rockstars, ont souvent fait l’objet de fantasmes et d’histoires que l’on pourrait qualifier parfois d’extravagantes. Parfois dramatiques mais souvent drôles, ces anecdotes font parties intégrantes de l’histoire de cette musique. Laurent Charliot a décidé d’en raconter certaines, et suite à son premier volume, il a eu la bonne idée d’écrire un tome 2 de ces « Rock stories » qui est une réussite totale !

Voilà donc deux cents nouvelles histoires racontées sous forme de nouvelles avec un grand souci de précisions. On peut ainsi découvrir les aventures des Status Quo avec un kangourou en Australie, comment Elvis s’est vu refuser un poste de chanteur dans un groupe, sous prétexte qu’il n’était pas bon ou encore comment Dave Grohl a un slip de Brian May dans son salon. Deux cents histoires, deux cents anecdotes très drôles qui permettent de mieux comprendre pourquoi le rock est rock !

Attention, il ne s’agit pas d’un livre de fan pour initiés mais au contraire un livre passionnant qui se lit comme des nouvelles. Emballé par cette démarche et par la lecture de ce livre, j’ai posé quelques questions à Laurent Charliot pour en savoir un peu plus.

Peux-tu te présenter ?

Je suis Laurent Charliot. Je viens de Nantes où je suis reconnu comme « spécialiste de la scène musicale nantaise » en tant qu’activiste et musicien. Je lui ai consacré des livres, des documentaires et même kune exposition. J’écris des livres depuis 20 ans et le petit dernier, dont on va parler, « Rock Stories, Tome 2 » est mon neuvième.

Laurent Charliot
Droits réservés

Pourquoi faire un livre sur des anecdotes de « Rock Stars » ?

J’aime beaucoup ça ! C’est ce qui me berce depuis que je suis gamin. Avant d’être un historien ou un écrivain de la musique, je suis d’abord un passionné. Depuis que je suis gamin, j’écoute et j’achète des disques. J’ai beaucoup parcouru les pochettes, autant que d’écouter les disques. Je regardais les détails, comme le nom du bassiste, où était le studio… Quand je découvrais des musiciens en commun avec un autre groupe, j’étais tout content. Je lisais des magazines comme Best et Rock’n Folk à qui je suis toujours abonné. J’ai toujours aimé cette grande histoire de la musique, avec un grand H. Cette histoire de la musique que l’on connaît tous depuis les années 50 mais aussi la petite histoire avec les potins et les anecdotes, tout ce qui fait que le rock est rock !

Comment tu fais pour les trouver ces anecdotes ?

J’en lis, on m’en raconte parce que je suis dans un milieu où il y a beaucoup de musiciens qui en racontent beaucoup… Je lis beaucoup de biographie et j’essaye de découvrir des choses différentes. C’est un travail de journaliste, de recherches… Le plus compliqué est de vérifier l’information avec des archives ou des biographies. Avec internet, on a accès à une masse d’informations mais il faut toujours relire les biographies et des articles pour recouper et vérifier l’information.

Tu fais comment la sélection ?

Tout d’abord elle est naturelle : quand il s’agit des Beatles ou des Rolling Stones, tu as tellement d’informations et il y a tellement de choses à dire. Je veux rester assez large et parler des artistes des années 50 ou 60, jusqu’à Rammstein ou Orelsan. Je tiens à rester dans la musique populaire mais toujours avec un lien sur l’histoire du rock. Quand je parle de Michael Jackson, je le rattache à son anecdote avec Jarvis Cocker de Pulp au Grammy Awards.

Tu dois faire attention entre le mythe, la légende et la réalité ?

Oui, par exemple si tu prends la fameuse histoire de Keith Moon, le batteur des Who, qui aurait jeté une voiture dans une piscine. Tu vas trouver plusieurs types de voitures, dans différentes villes et personne n’est d’accord sur la marque ou le lieu de cette histoire. Tout finit par se mélanger et souvent la mémoire flanche. C’est comme ça que tu t’aperçois que rien n’est figé. Moi, je suis là pour « lisser » l’histoire. On est toujours entre le mythe et la réalité, c’est ce qui rend le rock aussi fort et beau. Il y a beaucoup d’histoires où on a tout et son contraire.

Ces histoires sont souvent très drôles comme celle de Elvis où le leader d’un groupe local lui avait refusé le poste de chanteur, en lui disant que cela ne marcherait jamais et qui l’a rappelé après, quand Elvis était numéro 1, pour lui proposer cette fois d’intégrer le groupe.

(Rires) On est sur le même niveau que le DA qui avait dit aux Beatles, ça ne marchera jamais (rires). Ces gens ont changé le cours de l’histoire. Je reste dans la grande mais aussi la petite histoire. Quand je raconte que Dave Grohl (batteur de Nirvana et chanteur des Foo Fighters NDLR) a le slip de Brian May (le guitariste de Queen, NDLR) sur la porte de son salon, on est dans le « Paris Match » des rockeurs, dans le petit potin… J’ai essayé de raconter toutes ces histoires avec un peu d’humour et de recul. Je voulais en parler simplement.

Est-ce que tu n’as pas rendu ces rockeurs plus humains, voir grands gamins, tout en minimisant pas le problème de la drogue ?

Tout d’abord je ne veux surtout pas vénérer des rock stars. Je ne suis pas fan dans l’âme ! Pour avoir fréquenté quelques artistes de renommée, tu t’aperçois que ce sont des gens comme toi et moi, assez simples ! Je voulais en parler simplement.

A la lecture de ton livre on s’aperçoit que les années 60 et 70 ont été des années très… rock !

Absolument, le rock aujourd’hui a perdu un peu de sa fougue. Si on devait raconter toutes ces histoires avec des artistes d’aujourd’hui, on irait chez des rappeurs ou des stars du RnB. Il n’y a plus de rockeurs qui cassent des chambres d’hôtels. Ce sont les Jay Z et autres qui font la une de la presse.

On a l’impression que sur les années 2000, 2010 ou 2020, ils sont moins « graves » que les artistes des années 70 ?

Bien sûr, c’est beaucoup plus raisonné même si on trouve un Muse qui a le record de guitares cassées en tournée, mais ça reste gentillet parce que c’est fait dans des stades avec pleins de caméras. J’essaye juste de faire de toutes ces histoires, bien différentes, des histoires extraordinaires. Entre la folie d’un Keith Moon qui jette de la dynamite dans les toilettes des hôtels et un Philippe Katerine qui chuchote à l’oreille de Catherine Deneuve dans un train, il y a une grosse différence mais j’essaye de tout mettre sur un même niveau.

Ton livre ce sont vraiment des petites nouvelles, on peut aller chercher ce qu’on veut !

C’est voulu, ce sont des petites nouvelles, qui sont vérifiées, qui partent toujours de faits réels avec des lieux et des faits précis dont j’essaye d’en faire des petites histoires, des petits épisodes… Il y a un début, une fin parfois belle parfois moins belle, mais c’est clair qu’il y a une histoire qui est racontée.

Quelles sont tes préférées ?

Il y a celle qui a déclenché l’écriture du tome 2, celle de Status Quo avec le kangourou en Australie. Après le tome 1, où j’avais raconté deux cents histoires, je pensais avoir fait le tour mais des gens venaient me voir pour dire « tu aurais pu raconter ça » ou « il y avait ça ». Au cours d’une dédicace, une personne est venue me voir pour me dire « tu n’as pas mis l’histoire du kangourou de Status Quo ». Je ne la connaissais pas et cette personne m’a dit « je te laisse chercher, je ne te la raconte pas ». Le soir j’ai cherché et sur un site en anglais j’ai trouvé cette histoire exceptionnelle (rires). A partir de là il fallait faire un tome 2 et sans cette histoire il n’y aurait pas eu ce livre. C’est pour ça que c’est ma préférée.

Il y a peu de Français, on a l’impression qu’ils sont plus sages ?

(Rires) C’est ce que je me suis dit, certes i l y a l’histoire de Jean Louis Aubert qui dégringole dans la loge de Patti Smith au Bus Palladium ou celle des Little Bob Story qui vont se battre à France-Inter avec José Arthur, mais on peut dire que les français ont été assez sages. Mais quand tu es une star internationale, que tu vas dans les plus grands hôtels et que tu te promènes en jet de ville en ville, tu peux te permettre des choses alors que nos français étaient contents d’être dans un Ibis quand ils allaient jouer à Clermont Ferrand ou Villeurbanne (rires). J’ai surtout essayé de mettre tout le monde sur le même plan et j’y ai mis autant d’intérêt.

Ton style est plus romancier que journaliste ?

Oui, j’ai fait pas mal de travaux d’écriture pour la presse ou des documentaires et c’est vrai que ce n’est pas une écriture de journaliste. C’est pour ça que ça ressemble à des nouvelles. De de chaque anecdote je fais une petite histoire…

Qui est Bruce Tringale, qui a fait ta préface ?

C’est un passionné de rock qui habite en région parisienne et qui m’a contacté par les réseaux sociaux. Il a un blog « brucelit » qui est très actif parce que c’est quelqu’un qui lit beaucoup. Il a rejoint la nouvelle mouture de Best. Il avait chroniqué le tome 1 et il est venu à moi. On a sympathisé via mail et messenger et quand il m’a demandé s’il y aurait un nouveau tome et qu’il a su que c’était en route, il m’a proposé de faire la préface et j’ai dit oui.

Ensuite il y a Edwige Dupont qui a fait des illustrations ?

Nous nous sommes rencontrés via les réseaux. J’étais tombé sur des dessins qu’elle faisait sur le blog de Bruce Tringale. Je l’ai contacté et lui ai proposé de faire 40 portraits de rock stars pour le tome 1. Le livre sortait un mois et demi après et elle a dit oui. Naturellement je lui ai proposé d’en faire pour le second. C’est une personne très douée !

On parle de ton éditeur : Iéna Editions ? c’est qui ?

C’est la personne avec qui tu parles (rires). Je suis en auto-édition. Ce sont des livres de « niche » et j’ai la chance qu’ils se vendent pas trop mal. J’ai ma « base fan » (rire !). C’est un réseau que j’ai constitué d’abord à Nantes parce que je suis très actif dans le circuit musical et ensuite j’ai pu le développer un peu partout en France. Maintenant je suis dans toutes les librairies hexagonales. Je m’occupe moi-même de la distribution et comme ça je peux aussi avoir un retour financier plus intéressant.

Il y aura-t-il un tome 3 ?

On m’a déjà posé la question et oui il y aura un tome 3. J’ai déjà répertorié 187 histoires et 31 sont écrites. Il y a des histoires d’artistes du passé, comme une que je viens de trouver sur Buddy Holly mais aussi des histoires actuelles. Il sortira d’ici à un an et demi et je trouverais facilement les 13 manquantes.

Quels sont tes projets ?

Ce tome 3 mais aussi des projets d’écriture non musicale et je fais beaucoup d’audiovisuels et de podcast sur des projets locaux pas forcément culturels. Je travaille notamment une série de podcasts avec Woodbrass sur l’histoire du rock.

Le mot de la fin ?

Ces petites histoires sont pour tout le monde, on peut y trouver ce qu’on veut. Un jour, un copain m’a dit « Laurent tu as fait un très bon livre de chiottes ». Au début c’est un peu choquant mais j’ai compris qu’il voulait me dire : c’est un livre avec des petites histoires courtes avec des gens connus que tu peux laisser traîner n’importe où… notamment aux chiottes. Chacun y trouve ce qu’il veut. En plus dedans je dis l’année où cela se passe, l’endroit où se passe, combien de disques ils ont vendu… C’est un peu « le Rock pour les Nuls » mais ça ne dérange pas. Je suis plus un anecdotiste qu’un historien.

En fait c’est le livre d’un fan pour des fans ?

Oui, j’aime penser que j’ai écrit le livre que j’aurais aimé lire et quel plaisir j’ai à l’écrire ! Je peux redécouvrir comme ça plein de choses et c’est trop bien.

https://www.iena-editions.com/produit/rock-stories-tome-2-200-nouvelles-histoires-insolites-et-incroyablement-rock/
https://www.iena-editions.com/