Marc Minelli : « Sweet Home », le nouveau disque d’un artiste indispensable

jeudi 10 mars 2022, par Franco Onweb

Marc Minelli, tout bon amateur de musique se doit de le connaitre tant le talent du monsieur est immense. Cela fait plus de quarante ans que le chanteur d’origine havraise nous envoie régulièrement des albums qui font du bien à entendre. Le nouvel album en date s’appelle « Sweet home » et dans la période anxiogène que nous vivons il est conseillé à forte dose tant il déborde, comme d’habitude, de chansons impeccables.

Pour célébrer ce nouvel opus comme il se doit j’ai posé quelques questions à Marc Minelli pour en savoir un peu plus.

Comment vas-tu ?

Oh, merveilleusement bien si l’on considère l’état général des choses, disons que j’ai connu des périodes plus folles en termes d’espoir, de bonheur, de création, de savoir-vivre… Mais bon, une des règles du jeu consiste à s’adapter, et çà j’y arrive assez bien, alors je ne me considère pas malheureux, loin de là !

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Peux-tu nous résumer ce que tu as fait ces cinq dernières années ?

Je n’ai rien changé à mon bain de musique quotidien, à mon travail de composition, concerts, enregistrements… Je joue en moyenne une cinquantaine de fois par an, je sors un disque quand j’ai quelque chose à dire et je collabore à divers projets çà et là… A la maison je travaille tous les jours sur des nouveaux morceaux qui peuvent se retrouver sur un disque, un film ou dans un spectacle, je fais ça comme un exercice quotidien, comme un entrainement, je chante aussi, au minimum une heure après le petit déjeuner puis je me met à l’ordi, et je re chante l’après-midi un répertoire différent de celui du matin…

Concrètement ces 5 années se sont traduites par une foule de concerts, deux disques, « Playlist » et « Sweet Home », un single en collaboration « Pressure » sur le net et la construction de spectacles, notamment des portraits de gens dont je suis fan, d’autres sets aussi à base de mes chansons ou de reprises…

Comment as-tu vécu le Covid et comment t’es-tu occupé ?

Je n’ai souffert de rien, mon fils qui était en internat est revenu vivre avec nous pendant le premier confinement, c’était cool, on avait la chance d’avoir un jardin, je travaillais avec mon pote Florent via le net, on s’envoyait les fichiers entre Vendôme et Brooklyn… Les choses se sont compliquées avec les histoires de couvre-feu puis de pass-vaccinal ensuite, mais globalement ça a été car je pouvais évoluer dans toutes sortes d’endroits hors-circuit qui n’étaient pas forcément soumis à restrictions. Par contre le 12 juillet quand notre cher président a parlé j’ai bien compris que je ne pourrais pas échapper au vaccin si je voulais continuer à voyager et travailler, ça m’a coûté une nuit blanche et un mal de tête carabiné, bien conscient que le monde avait changé, j’ai pris rdv…

Tu sors un nouvel album « Sweet home », peux-tu le présenter ?

C’est arrivé à un moment où j’ai cherché à mettre un peu d’ordre dans mes archives, j’y ai retrouvé une tonne de trucs intéressants et me suis dit qu’en dépoussiérant un peu ou beaucoup il y avait là de quoi faire quelque chose. Toutes ces chansons m’étaient venues naturellement, les mélodies coulaient de source ainsi que les arrangements mais je n’avais pas forcément eu la technique ou le temps pour les développer… C’est aussi un moment qui a suivi un assez sérieux problème de santé, j’ai changé pas mal de choses, appris la sagesse, beaucoup réfléchi… Tu l’as fait où et avec qui ? Seul chez moi puis avec un type génial à Blois, Fred Gramage, qui travaille sur le même logiciel que moi et a tout mixé en studio, très vite, très bien… Le genre de gars à qui tu peux confier ton projet sans jamais craindre d’être trahi, à la limite tu n’as même pas besoin d’être là, les bases sont délimitées et respectées dès la première séance ! … J’ai bossé également, et bosse toujours, de cette même façon avec mon ami Florent Barbier (Ex Roadrunners Ndlr), un genre de ping pong via wetransfer, le projet sortira un de ces jours…

Qu’écoutais tu quand tu as fait ce disque ?

J’écoutais en priorité mes vieilles maquettes, essayant de comprendre la démarche, le sens de chaque chanson, pas facile pour un genre de cinglé de travail comme moi, certains trucs ont tellement vite été balancés sur bande puis oubliés que le résultat pouvait être totalement surréaliste, surtout au niveau des paroles ! … Aussi parallèlement nous avons débuté une collaboration avec mon autre fils, Elliott, qui lui est expert en anglais et musicien et a finalement co-écrit ou réécrit tous les textes…

Tu arrives à mêler l’électronique et l’acoustique, penses-tu continuer dans ce mélange et pourquoi ?

Disons que j’ai fait ça pendant plusieurs décennies, que j’ai poussé le bouchon avec Electro Bamako et que j’aurais maintenant tendance à privilégier le retour aux « vraies » chansons… Par contre il est beaucoup plus pratique d’utiliser des samples, pour les batteries notamment, que d’installer tout un matériel dans la cave en organisant des sessions avec des musiciens qui viendront des 4 coins de France voire de la planète ! …

Pourquoi ce titre « Sweet home » ?

C’est lié aux confinements, et à force de passer sa vie dans les transports et dormir à l’hôtel on finit par apprécier follement le temps passé chez soi, et c’est ce que j’ai ressenti à cette période.

De quoi parlent tes textes ?

Pour beaucoup de ce qu’est devenu le monde, qui n’était pas parfait loin de là mais où on avait quelques possibilités… Pour être concret je dirais que dans les 80’s tu organisais une soirée à Marseille par exemple, et en un après-midi avec le bouche à oreille, sans portable et avec 3 affiches tu faisais venir 400 personnes qui ne rechignaient pas à filer 15 balles, c’est du vécu. On s’habillait avec des fripes mais de manière assez classe, on ne bouffait pas au fastfood, un café dans un gobelet carton chez Starbucks aurait été le comble du mauvais goût, tu pouvais aussi trouver un petit job vite fait en cas de besoin et tu n’avais pas besoin de remplir des formulaires électroniques pour tout et tout le temps. Quoi d’autre ? … Il me faudrait l’équivalent d’un dictionnaire pour décrire tout ce qui était bien et qu’on ne pourrait plus vivre maintenant, ces saloperies d’écoles de commerce et la politique ont gagné, l’air ne sera plus respirable dans très peu de temps, on change les équipes qui gagnent, on tue les vocations, magnifique, quelle belle victoire… La poésie ? L’idéalisme ? L’érudition ? Le rêve ? La saine séduction ? … A l’heure qu’il est remplir des cases dans un profil et te vendre sur le net juste pour te faire des amis ou trouver un job, sans personne à qui parler ? … C’est no way pour moi.

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Comment peut-on trouver le disque ?

Dans quelques boutiques spécialisées, aux concerts, et surtout par correspondance en m’envoyant une demande sur Facebook en message personnel, ça permet d’échanger un peu, de faire en sorte que mon disque ne soit pas seulement celui que tu ne trouves pas parce qu’il est rangé dans le rayon Rock français du grand magasin alors qu’il est chanté à 100% en anglais, Lol ! … Entre autres…

Comment cela va-t’il se passer sur scène : vas-tu prendre des musiciens ?

On a monté un projet qui s’appelle « Le Havre all Stars » avec Olivier Durand et Alan Fatras par ailleurs musiciens d’Elliott Murphy, mon fils est à la basse et à quatre je crois que nous avons l’équilibre parfait pour tout jouer de la meilleure façon, par ailleurs ce sont des gens avec qui je n’ai pas besoin de parler des heures pour qu’on se comprenne, tout est histoire de dosage et d’adaptation, je compte jouer avec eux longtemps !

Tu fais beaucoup de concerts « tribute » à des artistes, est ce que tu vas continuer et pour quel artiste ?

C’est une forme de spectacle que j’avais inaugurée avec Dominic Sonic, nous avions repris une vingtaine de chansons de T Rex et nous étions vraiment éclatés. Puis Bowie est parti et je me suis dit que malgré l’appréhension de ne pas y arriver il fallait quand même que je fasse quelque chose, et à force de travail ça a marché. Ce ne sont pas vraiment des « tributes », plutôt des « portraits », c’est un concert de Marc Minelli à base de titres d’un artiste dont je m’approprie les chansons, il y a une notion d’hommage bien sûr, mais pas d’imitation ou de recherche du même style, je m’attache aux mots et à la mélodie, à la chanson, et c’est moi, point barre. Je vais continuer car j’y apprend beaucoup et j’ai l’impression de n’avoir jamais si bien chanté, en grande partie bien sûr parce que les chansons sont exceptionnelles. J’ai un ami au Havre qui tient un endroit, le Bistrot, où je suis en résidence à raison d’une fois par mois, c’est parti de là et d’un pari : Un artiste différent chaque mois, c’était la donne ! Alors… Bowie, Lou Reed, Iggy, Kinks, Tom Waits, Clash, Willy de Ville, T Rex, Gainsbourg, Dylan… Tout ce que j’aime, quoi ! …

Quels sont tes projets ?

Ne rien lâcher, chanter, jouer, m’occuper de ma famille et de mes amis que, pour la plupart je ne vois pas suffisamment. En préparation j’ai cet album avec Florent Barbier, une collaboration avec Olivier Durand le guitariste Havrais, un spectacle hommage au cinéma de Jim Jarmusch en collaboration avec un musicien de l’Opéra de Marseille et quelques nouveaux portraits, celui de Prince notamment, grand rocker devant l’éternel, dont les chansons anciennes sont un régal à interpréter.

Le mot de la fin ?

Je saurais exactement quoi faire si c’était à refaire : La même chose, ou presque !

https://www.facebook.com/marc.minelli.7
https://marcminelli.bandcamp.com/album/sweet-home