Les Tikis : de la Nothern Soul qui vient du sud.

samedi 20 avril 2019, par Franco Onweb

A la fin des années 60, un mouvement musical vit le jour dans le nord de l’Angleterre : la Northern Soul ! De jeunes anglais se précipitaient tout les week-ends dans le nord de l’Angleterre pour danser sur des disques de « soul music ». Ce mouvement engendra de nombreuses vocations et depuis des passionnés célèbrent cette musique !

Les Tikis font partis de ce grand mouvement. Depuis Nice, leur ville d’origine, ils parcourent les routes pour « prêcher » la bonne parole. Au moment où sort leur premier 45t, j’ai discuté avec Fréderic Martinez, le guitariste de cet élégant quintet pour qu’il nous raconte sa passion pour cette musique et l’histoire de ce groupe détonnant.

Les Tikis existent depuis une dizaine d’années mais nous nous connaissons depuis très longtemps. Nos personnalités différentes sont noyées dans une forte complicité, ce qui nous autorise à nous dire les choses de façon parfois… Très latine (rires). Comme dans une famille , nous prenons soin les uns des autres, mais ça ne nous empêche pas de nous vanner tout le temps. Le groupe a connu plusieurs périodes. La première mouture des Tikis, c’était trois chanteuses dont Marie Loupiac et Isa Marceddu, Fred Dormoy le bassiste des « Nighthawks », son fils Maxime à la batterie et moi à la guitare. On répétait régulièrement mais c’était… Comment dire ?… C’était pas ça. Nous n’arrivions pas à trouver une cohésion, un son de groupe. Un an plus tard, à l’occasion de l’anniversaire d’Isa organisé par son compagnon, nous nous sommes retrouvés avec Frank Durban (les Playboys Ndlr ), Christine Lidon (Ex chanteuse des Bandits Ndlr ) et les deux filles, à jouer quelques morceaux… Frank trouva « ça » super et lança l’idée de faire un groupe avec trois chanteuses (ah, l’alcool… Rires). Aussitôt dit, aussitôt fait : Nous abandonnons l’ancien groupe pour monter celui-ci avec lui, Christine et Thierry (Lespinasse Ndlr ) qui était le prof de batterie d’Amina (compagne de Frank à l’époque).

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(Les Tikis en concert - Photo donyweb.net)

Quelle est la composition actuelle des Tikis ?

Au bout de quatre ou cinq ans, Christine est partie vers d’autres horizons. Désormais, nous sommes cinq : Isa et Marie au chant, Thierry à la batterie, Frank à la basse et moi à la guitare. Frank joue avec les Playboys et les Dino Farfiza et moi de mon côté, avec les Zemblas, les Stores et les Beatniks.

Tu peux présenter les deux chanteuses ?

Bien sûr, tu as raison, soyons galants (rires) ! Au milieu des années 80, Isa, toute jeunette, faisait les chœurs chez « les Mokos ». Récemment elle a joué de la basse dans « les Blondes », le groupe de Christine Lidon. Marie, elle, est la chanteuse du groupe « Bizarre Cooking Accident » avec son organiste de mari Charles Loupiac (ex Playboys Ndlr) et Jean-Marc Seni (ex Dentist) à la guitare.

C’était une volonté de faire un « Girl’s band » ?

Oui, on voulait aller dans un univers que l’on ne connaissait pas. Et travailler autour des harmonies vocales était une expérience nouvelle et excitante pour moi qui suis un fan de Brian Wilson. Nous avions trois tessitures de voix et trois timbres très différents qui nous permettaient de couvrir une très large palette. On aimait le sixties, le garage ou la soul mais on voulait vraiment faire de la « Northern Soul », peu pratiquée à l’époque, en tout cas à Nice.

Justement, peux-tu nous expliquer ce qu’est la « Northern Soul » ?

C’est une extension de la Soul Music, de la fin des années 60 et du début des années 70, qui est inspirée par les grands classiques de la Tamla Motown. Malheureusement, au début des années 70, la Soul américaine commence à lorgner sérieusement sur le Funk et à s’éloigner de ses racines. Les anglais, n’appréciant plus le son, décident de revenir aux sources de cette musique et exhument des tas de morceaux géniaux qui n’ont pas eu le succès mérité aux Etats-Unis. La plupart des DJ’s se tournent donc résolument vers ce son typique des années 60, caractérisé par ce beat spécial. Généralement, ces soirées avaient lieu dans le nord de l’Angleterre, d’où le nom de « Northern Soul ». Ces « allnighters », ces soirées qui duraient toute la nuit, étaient d’énormes rassemblements de danseurs dans des lieux mythiques comme le Wigan Casino, aujourd’hui disparu.

La « Northern Soul » est le mouvement qui prolonge le mouvement Mods en Angleterre dans les années 60 : c’était donc naturel que tu en fasses ?

Oui, c’est un des mouvements. L’origine de cette musique est ancrée dans les sixties. C’est de la Soul métissée avec du Rythm’n’Blues. Je m’y sens très à l’aise avec mon son et mon jeu de guitare. Cela étant, il existe des trucs horribles qui se réclament de la Northern (rires), « The love boat » (le générique de « La croisière s’amuse ») n’est pas de la northern ! Il faut savoir raison garder…

Mais vos concerts ce sont surtout des soirées dansantes ?

Oui ! Et nous animons aussi les thés dansants, les mariages et les Bar-Mitzvah ! Rires… Plus sérieusement, notre but, dans ce groupe, est de faire danser les gens, de les faire participer. La musique est un moyen de faire la fête et de partager des sentiments, en tout cas dans les groupes que je pratique. La « Northern » c’est fait pour danser, alors si vous venez à nos concerts, ne vous en privez surtout pas, ça nous rend heureux !

Vous jouez des compositions ou des reprises ?

Ce ne sont que des reprises !

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Pourquoi ?

Deux raisons : La première parce qu’il y a énormément de bons morceaux et que ce serait trop bête de passer à côté. La seconde est que la « Northern Soul » française est un concept beaucoup trop psychédélique pour moi (rires !) et que je ne sais pas écrire en anglais. De plus, si je devais composer des morceaux dans cet esprit, je ne pense pas être capable de les faire sonner sur scène, ce serait vraiment compliqué au vu de notre formation ( guitare/ basse/ batterie). Dans la Northern, pour moi, la guitare n’est pas un instrument primordial. J’adapte les morceaux à notre format et c’est un sacré boulot… Par contre, quand je crée un morceau, je sais très tôt s’il va y avoir du piano, des violons et (ou) des cuivres… Les arrangements naissent en même temps que la partition avance, ils sont induits et font partie intégrante de « l’œuvre ». C’est pour ça que j’aurais vraiment du mal à l’adapter à notre formation car il m’est difficile, voire impossible, de synthétiser un de mes morceaux. Pour moi, tous les évènements ont leur place et existent parce qu’ils apportent quelque chose à la chanson. Je ne saurais pas enlever une partie de cordes ou de piano et ré-arranger le morceau ainsi amputé. Tout est imbriqué et important. Cela m’est plus facile quand j’entends les morceaux des autres. J’arrive à extraire les parties primordiales de celles qui sont « superflues » et je recrée un arrangement à la guitare.

Mais tu ne te sens pas frustré par votre format ?

Evidemment, je rêve d’un orgue (Hammond, bien évidemment), d’une section de cuivres, de violons, de choristes, de danseuses… Mais comment pourrait-on tourner ? Les salles proposant une scène suffisamment grande pour accueillir un « big band » dans de bonnes conditions ne sont pas légion. Et on ne peut entrer qu’à cinq dans le van (rires).

Vous avez beaucoup joué ?

Oui, à Nice et en France, mais aussi dans des rallyes scooters Mods en Allemagne, en Autriche, en Espagne, en Italie… Bientôt la capitale pour la première fois avec les Tikis. Venez nous voir et nous écouter nombreux, c’est en mai !

Dans un rallye Mods ? (rires)

Non (rires). Dommage… Ça se passe à l’Armony et à l’Estive*. J’ai déjà joué à l’Armony avec les Zemblas. J’aime beaucoup l’endroit et le boss. L’Estive je ne connais pas mais c’est toujours un plaisir de jouer à Paris.

*le vendredi 10 mai à l’Armony, 39 rue Edouard Vaillant, 93100 Montreuil et le samedi 11 mai à l’Estive, 106 avenue Jean Jaurès 75019 Paris.

 https://www.youtube.com/watch?v=lzaRgWXp4R8

Vous avez joué au 24 heures du Mans ?

En effet, au Mans classique, la course de voitures de collections. C’était Il y a trois ans et ça c’est super bien passé ! C’était comme dans le village du « Prisonnier ». Tout le monde était raccord ! On était dans notre élément.

Justement sur scène vous soignez le décor à fond : les amplis, votre look très sixties …

Ça n’est pas qu’un décor. Je me vois mal jouer avec des instruments d’aujourd’hui… Je n’aime ni leur look, ni leur son. Frank est marié avec sa basse Höfner et son Ampeg et moi avec ma Fasan et mon Ampeg. Quant à nos fringues, ce sont celles que l’on porte tous les jours… On a su se passer de Roger Harth et Donald Cardwell (voir Wikipédia pour les plus jeunes).

Et vous sortez enfin un premier disque ?

Yeah ! Ça a été un concours de circonstances : Des étudiants d’une école de musique niçoise m’ont contacté dans le cadre de leurs cursus pour enregistrer et mixer deux morceaux des Zemblas. Mais certains membres du groupe n’étaient pas dispos. J’ai sauté sur l’occasion pour leur fourguer les Tikis. On est partis sur deux titres : « Soul Time » et « Gone with the wind ». On a enregistré guitare/basse/batterie le matin en une heure et l’après midi on a fait les voix. J’ai retravaillé les arrangements et mixé le tout chez moi. A la première écoute, Franck a dit : « c’est super, on devrait sortir un EP ! ». Tout le monde a bien rigolé mais il a persisté. Donc… J’ai récupéré deux morceaux que nous avions enregistrés précédemment, que j’ai ré-arrangé (ajout d’orgue, de cordes, de perçus, de guitares acoustiques, etc. On ne se refait pas, hein ! Rires) et que j’ai remixé : Nous avions maintenant les quatre titres de notre EP vinyl. Marie s’est chargée de la pochette, le mastering est fait, il ne reste que le pressage.

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(Pochette du premier 45 t des Tikis - Photo Sophie Rossetti, Art work Marie Loupiac) 

Ca va sortir quand et chez qui ?

Il va sortir chez « Dangerhouse Skylab », le label de Bruno Biedermann de « Dangerhouse Record Store » basé à Lyon**. Nous venons de recevoir les tests pressing. Si tout va bien, nous les aurons pour notre escapade parisienne du 10 et 11 mai. On croise les doigts !

** « Dangerhouse Record Store » - 3 rue Thimonnier - 69001 Lyon. Tel 04 78 27 15 64

Tu ne penses pas que ce groupe est sous exploité ?

Oui, parce qu’on est un bon groupe de scène, qu’on est toujours partant pour jouer et parce qu’on adore ça. Ça se ressent sur scène et dans le public. Mais le fait de jouer dans d’autres groupes n’arrange pas les choses, il faut savoir jongler avec les agendas de tout le monde. On loupe pas mal d’occasions.

C’est quoi pour toi le grand morceau de « Northern Soul » ?

J’adore un morceau de Nolan Porter qui s’appelle « if i could only be sure ». Il fait partie de notre répertoire, évidemment, et sera sur le EP. Un des rares morceaux Northern où la guitare est capitale.

Le mot de la fin ?

Keep The Faith !

Les Tikis en concert - le vendredi 10 mai à l’Armony, 39 rue Edouard Vaillant, 93100 Montreuil et le samedi 11 mai à l’Estive, 106 avenue Jean Jaurès 75019 Paris.

https://www.facebook.com/lestikis06

https://soundcloud.com/les-tikis