Interview de Christian Quermalet - 2e partie : un parcours indie pop !

lundi 9 mai 2016, par Franco Onweb

Cet article est la suite de : Interview de Christian Quermalet - 1re partie : une histoire de pop Française

Deuxième partie de l’entretien que nous a accordé Christian Quermalet. Nous verrons comment les Married Monk enregistrent aux USA, comment Christian se retrouve à jouer avec Yan Tiersen , de produire Superflu, avant de prendre du recul à Lyon.

Il nous parlera de ses projets avec Sylvain Vannot mais aussi du groupe avec lequel il remonte sur scène depuis peu : Pério ! Un moment passionnant qui montre bien l’importance et le talent de Christian Quermalet 

En 2001 arrive le grand changement dans ta carrière c’est « R /O/C/K/Y ». Vous allez à Tucson mais vous revenez avec un album pas du tout Arizonien !

On voulait enregistrer chez Jim (Waters). Etre plongés dans son univers. Et s’il avait habité au Niger ou à Sidney on y serait allés ! A Tucson, nous étions un peu coupés de tout lors des séances d’enregistrement. Le studio était situé dans une zone industrielle, bien loin du folklore local, dont nous voulions nous préserver. Cela aurait été trop facile de revenir avec un album « gavé » de trompettes Mariachis !

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(Annonce d’un concert des Married Monk en première partie de Jonathan Richman à Tucson en 1999, collection personnelle Christian Quermalet)

C’est un groupe neuf et pleins d’idées qui débarque là-bas ! Vu de l’extérieur ça se muscle un peu …

On était à cinq, mon frère venait de nous rejoindre. On avait un nouveau label et on commençait à écouter pleins de choses avec des machines, même si j’avais écouté Psychic Tv ou Throbbing Gristle dans les années 80 et 90.

On avait les ossatures de morceaux mais contrairement aux autres albums il n’y avait pas vraiment de maquettes. Dans le studio il y avait pleins d’instruments et on avait emmené avec nous une cantine pleine de petits claviers. C’était un véritable laboratoire. On tentait plein de choses. Jim (Waters Ndlr ) nous y invitait sans cesse. C’est un vrai producteur qui te pousse dans tes derniers retranchements !

https://www.youtube.com/watch?v=97CHjoXzT1I

Au niveau des ventes ?

Ça n’était pas terrible. 5 000 copies environs.

A l’époque il y a quelqu’un qui apparait dans ta carrière : c’est Yann Tiersen ! Tu commences à jouer avec lui à la même époque.

Oui, en 1998. Au début on était à trois sur scène : lui, moi et Claire Pichet qui chantait sur certains titres.

Tu le rencontres comment ?

Via son manager, Charles Bensmaine, qui nous met en contact. Yann cherchait alors quelqu’un pour l’accompagner sur scène. On se rencontre après un de ses concerts, à l’Européen, le jour de la mort de Franck Sinatra ! Le courant passe plutôt bien et on décide de travailler ensemble.

https://www.youtube.com/watch?v=7jfwynGMo4E

Il y aura des concerts ou les Married Monk ouvriront pour Tiersen ?

Oui, plusieurs. La plupart du temps dans des grandes salles parisiennes.

Cela dit, ça n’était pas toujours évident car son public et le nôtre étaient très différents…

Ça vous a aidé ?

Oui, bien sûr ! On a pu ainsi jouer devant de plus grandes audiences. Il nous a également permis de signer sur Ici d’Ailleurs (leur label Ndlr) .

A l’époque tu es vraiment présent partout : disques, concerts …

C’est vrai… Mais c’est aussi ce qui m’a fait en partie arrêter avec lui : Je n’avais plus de vie personnelle… Nous vivions dans un Tour Bus, buvions et fumions beaucoup, dormions assez peu et accumulions les kilos ! On tournait dans toute l’Europe, au Japon, aux Usa… C’était l‘époque d’Amélie Poulain. Intense. A fond tout le temps.

Tu te sens comment par rapport au groupe à l’époque ?

Je me sentais un peu mal à l’aise. J’avais l’impression de m’en éloigner…

Autre personnage : Fabio Viscogliosi.

Ce fut une super rencontre ! Fabio nous a rejoint suite à une annonce que nous avions fait publier dans les Inrockuptibles en 1998. Nous cherchions quelqu’un après le départ de Stéphane Bodin (qui cofondera Bosco, quelques mois plus tard en compagnie de François MarchéNdlr).

Il jouait de la guitare ?

C’était un touche à tout : il jouait de la guitare, de la basse, des claviers et il chantait. Il est resté jusqu’à la fin de la tournée R/O/C/K/Y puis a sorti des albums sous son nom.

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(Married Monk à Poitier en 2008, de gauche à droite Philippe Lebruman, Nicolas Courret, Christian Quermalet et Etienne Jaumet - droit rèservé) 

Autre personnage important : Etienne Jaumet.

On l’a rencontré lors de notre premier concert à Mains d’Œuvres (St Ouen) où nous il travaillait comme ingé son. Au départ, nous ne lui avions proposé qu’une collaboration ponctuelle : l’enregistrement de l’album « The Belgian Kick » durant l’été 2003.

 Puis il est devenu membre du groupe à part entière tant les choses fonctionnaient bien entre lui et nous. Un fantastique musicien.

Il y a qui dans le groupe à l’époque ?

Philippe Lebruman, Jean Michel Pires et moi.

Votre son devient plus électro ?

Pas forcément plus « electro ».. On cherche juste à utiliser d’autres sonorités moins acoustiques.

A l’époque tu te sentais comment par rapport à la scène Mendelson, Perio… ?

Je me sentais bien, parce que j’ai fait partie des Tétines Noires je réussis à vraiment à pouvoir jouer et écouter de tout ! Je peux aimer la chanson Française, le Zouk … Regarde, en 2004, après une première partie au Trabendo de Kaolin, un couple de Bikers est venu nous voir pour nous féliciter ! Là tu te dis, « ils écoutent probablement des choses qui envoient comme ZZ Top, AC/DC ou Aerosmith et en même temps ils apprécient ce qu’on fait. C’est super. » Je suis moi-même un peu comme ça, éclectique. Je peux aimer Kate Bush, The Smiths, Michel Delpech et aussi Ornette Coleman, Ween, Nina Simone, etc… J’écoute de tout : du rock, du jazz, du classique … Vraiment de tout mais je reviens toujours aux mêmes choses.

Quoi par exemple ?

The Beatles, The Beach Boys, The Virgin Prunes, Bach, Nick Cave, The Cure…

En 2008, il y a votre dernier album, « Elephant People ».

Cet album était une commande. Il servait de « fil musical » à la pièce éponyme du metteur en scène bordelais Renaud Cojo, le thème central de la pièce tournant autour de notion (toute relative) de monstruosité. Nous interprétions sur scène des chansons, écrites donc pour l’occasion, sortes de portraits musicaux de chacun des personnages de la pièce, et ceci en alternance avec les scènes jouées par les comédiens. Passionnant…

https://www.youtube.com/watch?v=Fq2QjP4DLBE

Tu vis de quoi à l’époque ? Du groupe ?

Pas uniquement. Je suis technicien du son, diplômé de l’INA. Je produis et mixe des projets pour les autres.

Pourquoi d’ailleurs tu n’as pas produit les Married Monk ?

Disons que les albums ont tous été produits de manière collégiale. Je ne voulais pas être le seul à décider des directions à prendre. Certes, j’ai peut-être écrit 95% du répertoire du groupe mais en ce qui concernait la production ainsi que le mixage, tout le monde avait son mot à dire.

On ne t’a jamais proposé de composer pour les autres ?

Non, enfin si une fois, Universal m’avait demandé de faire un séminaire sur l’écriture en Angleterre avec Zucchero. Ce n’était pas possible !

Et des musiques de films ?

C’est arrivé avec le groupe, en 1999 un réalisateur est venu voir Universal (mon éditeur de l’époque), Tran Anh Hung, il voulait Tom Waits, on lui a proposé The Married Monk et ça lui a plu. Le film s’appelait « A la verticale de l’été ». Le film a même été projeté à Cannes ! Je n’ai pas pu y aller, j’étais à Tucson en plein mixage du deuxième album de Superflu !

Tu as travaillé avec Superflu ?

Oui. Nous nous sommes rencontrés en 1997 par le biais du Village Vert. J’ai travaillé sur leurs trois albums. Comme arrangeur et comme instrumentiste. Ils se sont séparés il y a quelques années, au grand dam de tous leurs fans.

Que l’on se rassure cependant : Nicolas Falez, le chanteur, nous réserve une bien belle surprise avec son nouveau projet « Fontaine Wallace » !

En 2012, il y a eu deux concerts de Married Monk pour les soirées « Gonzaî », un à Paris et l’autre à Lille.

Ce furent nos deux derniers concerts. Il n’y en aura plus d’autres. Pourtant ces deux soirées s’étaient bien passées, on s’était bien entendus. Mais bon… Nos rapports sont différents, on se voit beaucoup moins qu’avant. C’est comme ça.

Cela a dû te faire plaisir cette (re)sortie de The Belgian Kick en vinyle chez Gonzai !

Oui, on n’avait jamais rien sorti en vinyle, cela m’a fait plaisir que le disque sorte sous ce format ! Après les deux concerts en 2012, on pensait éventuellement enregistrer à nouveau quelque chose ensemble mais cela ne s’est pas fait… J’étais à Lyon à l’époque, une ville qui m’excitait pas vraiment, j’étais pas au mieux … (silence).

Entre temps tu as fait des concerts sous le nom de « Married Monk solo » ?

J’ai fait des concerts solos oui. Mais je n’ai rien enregistré sous mon nom depuis 2008. Enfin si, une reprise en anglais de Françoise Breut, l’année dernière.

Tu nous en parles ?

Éric Delporte, un vieux copain, m’a proposé de rentrer dans son groupe Perio. Je le connais depuis très longtemps, depuis les Beaux-Arts en 1990 à Nantes. J’avais joué sur son premier opus « Icy morning in Paris » sorti chez Lithium en 1994. En 2006 j’ai produit et mixé l’album « The Great Divine » sorti lui sur Minimum Music. Je fais partie du groupe à présent, comme bassiste.

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(Perio sur scène le 16 Octobre 2015 à Bobigny, Droit réservé) 

Et il y a Sylvain Vanot ?

Oui ! Il sort un (excellent) nouvel album en Mai. Il m’a contacté l’année dernière pour que je tourne avec lui. On se voit une à deux fois par semaine pour travailler. On sera en résidence en juillet à Lyon, à l’Epicerie Moderne pour un concert dans le cadre des Nuits de Fourviére. Deux sur scène ! Très excitant et plein de liberté !

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(Sylvain Vanot et Christian Quermalet en 2016, crédit photo Amandine Roozzo Corleone)
Quels sont tes projets ? C’est fini vraiment fini The Married Monk ?

(Silence) … Je crois oui... Quant à mes nouveaux projets, je suis dans l’expectative ! La priorité pour moi est de finir mes morceaux, d’avoir les ossatures et bien sûr, les textes. Quand il n’y aura plus qu’à savoir avec qui, où et comment, tout cela se finalisera, les choses seront plus simples !

J’ai déjà proposé à quelqu’un de travailler avec moi sur ce projet. Nous verrons ce que cela donne. Je réfléchis à un nom. J’espère tourner après !

Un mot pour la fin ?

Je ne suis pas très fort pour les fins !